Avril 2014 – Voici une semaine que nous sommes à Banda Neira et, si il y a un ustensile que nous n’avons pas prévu dans nos bagages, c’est le parapluie. Même le poisson crapaud que nous trouvons au pied de notre chambre ne nous donne pas les prévisions météo!
Effet de l’équateur, le temps est changeant et le ciel passe en quelques minutes de bleu à noir, chargé de lourds nuages qui crèvent en des pluies torrentielles d’une force incroyable. Et cela peut durer …
Apparemment, la saison sèche n’est pas encore là !
Cela fait la joie des enfants qui sautent en criant sous l’eau, improvisent des jeux de glissade sur l’herbe mouillée ou sur le carrelage.
Dans la rue les échoppes abattent une bâche plastique en attendant que ça passe.
Quant à nous, quitte à être sous l’eau, autant y aller franchement. Nous enfilons nos blocs et rendons visite aux poissons.
Ces jours là, on met l’objectif macro et allons sur les sites « muck-dive » où, malgré un manque de luminosité, notre guide Toby n’a pas son pareil pour dénicher les « little stuff », crevettes, crabes, nudibranches et autres minuscules choses n’échappant pas à son œil exercé et acéré.
Nous irons plonger sur les tombants où la visibilité peut atteindre 50 m quand le soleil semblera s’installer pour quelques heures.
Là, nous nous immergerons dans « le bleu des Banda »…
Après Lucipara et Gunung Api, nous continuons notre périple vers Sorong via le port de Banda Neira, Koon et Missol, autant de noms qui nous ont fait rêver pendant plus d’un an, chacuns étant chargés d’histoires racontées par les uns ou les autres …
Situé au Sud-Est des Moluques, l’archipel de Banda doit à son sol volcanique, la production du muscadier, une plante indigène dont le commerce suscita la convoitise des portugais, des anglais puis des hollandais durant les 16ème et 17ème siècles. La culture des épices (poivres divers, clou de girofle, cannelle ….) fit la réputation de l’archipel dont l’île principale, Banda Neira, garde encore des traces de ces différentes occupations coloniales.
Depuis qu’on nous avait parlé des épices de Banda, je rêvais de me promener sous ces arbres, de respirer ces essences odorantes, de goûter aux fruits et aux graines avant séchage et traitement. Ce rêve reste intact, car « l’île aux épices » se trouve à plusieurs heures de bateau du port de Banda où nous avons dû nous arrêter pour approvisionner le bateau en fuel.
Pas d’épices? Tant pis ! Nous plongerons sous le bateau, où nous avons la surprise de voir des poissons mandarins[1].
Des mandarins en plein jour ? Pas possible ! Ces poissons incroyables aux lignes sinueuses orange sur fond bleu et aux curieux dessins colorés de bleu, orange, vert, pourpre, jaune … sont très craintifs et ne sortent qu’à la tombée de la nuit pour accomplir une magnifique danse d’accouplement où le mâle et la femelle tournent l’un autour de l’autre.
Habituellement, ils se cachent dans les vieux récifs coralliens composés de squelettes de coraux morts, mais ici, à Banda, on les trouve aux abords de masses rocheuses où ils offrent aux plongeurs un spectacle quasi permanent. Faciles à apercevoir, mais pas faciles à photographier. Ces petites merveilles sont en perpétuel mouvement !
Bien que nous soyons dans un port, l’eau est incroyablement claire (pour preuve la couleur de ces ascidies) loin de la saleté vue lors de certaines « muck-dives » – ou plongées poubelles – comme dans le port d’Ambon par exemple!
Bien sur, nous avons mis les pieds sur la terre ferme : visite du Fort Belgica – vestige de l’occupation Hollandaise au 17ème, balade entre les anciennes bâtisses coloniales qui dénotent dans le paysage. Quel contraste avec les ruelles où pullulent de minuscules échoppes dans lesquelles on trouve tout et n’importe quoi. C’est là que nous avons tout de même trouvé les fameuses épices ainsi que des préparations sucrées à base de macis séché (écorce de la muscade), petits sachets que nous avons minutieusement trimballé jusqu’à notre retour à Paris, soit 1 mois plus tard !
Après le coucher du soleil, le bruit des pompes à diesel et des moteurs font place au silence, la mer devient lisse, les pêcheurs rentrent tranquillement. Tout s’apaise…
Quel calme ! Demain nous reprendrons la mer et nous ferons nos dernières plongées dans la mer des Banda, avec sa flore quasi intacte et grandiose, son bleu profond, ses tombants colorés …
Y’a pas à dire, la réputation de la région n’est pas surfaite ! La variété et l’intensité des couleurs font partie des Banda, à l’image de ce gamin rencontré au détour d’une rue …
[1] – Le poisson mandarin, nommé Synchiropus splendidus appartient à la famille des dragonnets.